Décidément, le discours du président rwandais Paul Kagame du génocide de 1994 qui aurait, selon lui, visé juste les Tutsi ne passe plus dans la communauté internationale. En marge de la commémoration, dimanche 7 avril 2024, de 30 ans de ce génocide, Washington a, par la voix de son secrétaire d’Etat, Antony Blinken, changé fondamentalement son narratif, incluant dans les 800.000 morts de La météo alerte : les pluies qui vont s’abattre à Kinshasa seront au-delà de la normale 1994 les Hutu et les Twa du Rwanda. Ce qui a terriblement énervé Paul Kagame qui n’a pas hésité à remettre à sa place – dans des termes peu courtois – le chef de la diplomatie américaine. C’est dire qu’entre Washington et Kigali, les lignes bougent. C’est le moment pour Kinshasa de capitaliser cet instant de désamour.
Lors de la commémoration des 30 ans du génocide rwandais le 7 avril dernier, le discours du président Paul Kagame a suscité une vive controverse au sein de la communauté internationale.
Kagame a longtemps soutenu que le génocide de 1994 avait ciblé exclusivement les Tutsi, mais cette vision unilatérale a été remise en question par les États-Unis.
Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a publiquement déclaré que les 800 000 victimes du génocide ne se limitaient pas aux Tutsi, mais incluaient également des Hutu et des Twa du Rwanda.
Cette prise de position a profondément irrité Paul Kagame, qui a réagi avec véhémence aux déclarations de Blinken, le renvoyant de manière peu diplomatique.
«Les Etats-Unis se tiennent aux côtés du peuple rwandais lors de Kwibuka 30, pour rendre hommage aux victimes du génocide. Nous pleurons les milliers de Tutsi, Hutu et Twa et autres dont la vie a été perdue au cours de 100 jours de violences indescriptibles », a-t-il écrit sur son compte X (ex-twitter).
Il s’agit là d’«une grande évolution dans le narratif du génocide de 1994 au Rwanda dans le discours officiel des Etats-Unis », a fait savoir à l’ACP (Agence congolaise de presse) un diplomate congolais à la retraite.
LA MISE AU POINT DE KAGAMÉ CONTRE BLINKEN
Visiblement irrité par ce virage à 180° de Washington, Paul Kagame n’a pas hésité à recadrer le chef de la diplomatie américaine.
En réponse à la question d’un journaliste sur le message de Blinken sur la plateforme sociale X, Kagame a déclaré qu’il croyait avoir conclu un accord avec les autorités américaines il y a dix ans pour qu’elles ne critiquent pas l’anniversaire du génocide.
«Quand il s’agit du jour de la commémoration, qui est le 7 avril, auriez-vous la gentillesse de commémorer avec nous et de vous arrêter là ? Il y a 365 jours dans une année.
Donnez-nous ce 7 avril, commémorez avec nous et ensuite, vous pourrez passer les 364 jours restant à nous blâmer pour tout ce que vous n’aimez pas – chez nous », a lancé le président rwandais.
De nombreux Rwandais ont reproché au secrétaire d’État américain Antony Blinken d’avoir omis de préciser que le génocide visait les Tutsi lorsqu’il a écrit à la fin de dimanche : «Nous pleurons le deuil des milliers de Tutsi, de Hutu, de Twas et d’autres dont la vie a été perdue au cours de 100 jours de violence indicible».
Les autorités rwandaises insistent sur le fait que toute ambiguïté quant à l’identité des victimes du génocide est une tentative de déformer l’histoire et de manquer de respect à la mémoire des victimes. Les responsables américains n’ont pas fait de commentaires à ce sujet. Mais, le clash est bien visible.
CHANGEMENT DE NARRATIF À WASHINGTON
Cette divergence d’opinions entre Washington et Kigali souligne un changement significatif dans les relations entre les deux pays. Alors que Kagame et l’administration américaine semblent être sur des voies divergentes, cela ouvre de nouvelles opportunités pour d’autres acteurs régionaux, notamment Kinshasa.
Le gouvernement congolais pourrait tirer parti de cette période de tensions entre les États-Unis et le Rwanda pour renforcer ses propres relations diplomatiques et consolider sa position régionale.
Avec les dynamiques en évolution entre Washington et Kigali, Kinshasa pourrait saisir l’occasion de jouer un rôle plus important sur la scène internationale.
Il est clair que les lignes bougent entre Washington et Kigali, et cette évolution pourrait avoir des répercussions significatives sur l’équilibre des pouvoirs dans la région. Alors que le président Kagame et l’administration américaine s’affrontent sur l’interprétation de l’histoire du génocide rwandais, d’autres pays pourraient chercher à capitaliser cette période de désaccord pour renforcer leur position sur la scène mondiale.
F.K.