Leçon magistrale de Jules Alingete Key, patron de l’IGF (Inspection générale des finances), samedi 9 novembre à la quatrième journée des Etats généraux de la Justice congolaise. Gendarme financier en chef de la République Démocratique du Congo, Jules Alingete est venu partager son expérience dans la traque des fossoyeurs de finances publiques. Sur le terrain, Jules Alingete a réussi à convaincre, même les plus indécis. Son action a permis à l’Etat non seulement de traquer, mais aussi de protéger les deniers publics Si le chemin parcouru est jalonné de succès, le patron de l’IGF plaide en faveur de la création d’un Parquet financier avec un pouvoir de sanctions très élevé. C’est en douze (12) piliers qu’il a résumé l’action à entreprendre pour une lutte efficace contre la corruption et le détournement des fonds publics.
A la quatrième journée des États généraux de la Justice congolaise, tenue le samedi 9 novembre, Jules Alingete Key, inspecteur général des finances (IGF) et chef de la lutte contre les abus financiers en République Démocratique du Congo (RDC), a marqué les esprits par une leçon magistrale. Alingete, figure de proue de la traque des malversations dans la gestion des deniers publics, est venu partager son expérience et présenter une vision stratégique de la lutte contre la corruption et le détournement de fonds publics en RDC. Ses actions sur le terrain, qui ont permis à l’État de préserver ses finances et d’endiguer les abus, ont d’ores et déjà produit des résultats significatifs.
Dans un contexte de méfiance et de scepticisme sur l’efficacité des institutions, l’action de Jules Alingete à la tête de l’IGF a permis de convaincre même les plus indécis de la nécessité et de l’efficacité de la lutte contre la corruption. En intensifiant le contrôle des finances publiques et en traquant les «fossoyeurs» de l’économie nationale, l’IGF a non seulement restauré la confiance du public, mais aussi contribué à protéger les deniers publics d’une manière tangible.
CREATION D’UN PARQUET FINANCIER
Pour pérenniser les efforts entrepris, Alingete appelle à la création d’un Parquet financier doté de pouvoirs de sanctions très étendus. Selon lui, un tel organe serait un levier indispensable pour renforcer la répression des crimes économiques. Actuellement, les sanctions à l’encontre des auteurs de détournements restent insuffisantes pour dissuader efficacement les fraudeurs. Un Parquet financier permettrait, selon l’inspecteur général, d’assurer une justice financière rapide et exemplaire, ce qui contribuerait à assainir l’écosystème financier congolais.
«Nous avons affaire à des magistrats qui, dans leur profil de formation, avaient peur de la comptabilité, des finances publiques et des chiffres. Aujourd’hui, la réalité est que le détournement et la corruption c’est au travers de la comptabilité, les finances publiques et les chiffres, voilà pourquoi nous avons dit qu’il faut créer un parquet financier où on aura des magistrats spécialisés et formés dans les infractions sur la criminalité financière», a indiqué le patron de l’IGF.
LES DOUZE PILIERS DE LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
Durant son intervention, Jules Alingete a détaillé une feuille de route en douze piliers, qu’il estime cruciaux pour une lutte efficace contre la corruption et le détournement de fonds publics. Ces piliers couvrent des mesures de prévention, de transparence, de coopération interinstitutionnelle, et de sanctions. C’est notamment, note-t-il, « 1. Création et mise en place d’un parquet financier; 2. Adaptation du Code pénal congolais aux nouvelles infractions de la criminalité financière; 3. Renforcement du caractère répressif aux actes de détournement de deniers publics au regard des dégâts considérables engendrés par ce fléau; 4. Renforcement des capacités des magistrats dans les finances publiques et la comptabilité; 5. Amélioration des conditions de travail des magistrats et allocation des frais de fonctionnement conséquents aux cours, tribunaux et parquets; 6. Renforcement du régime disciplinaire des magistrats; 7. «Promotion d’une culture d’éthique politique consistant à pousser les auteurs des détournements avérés, révélés par les organes de contrôle, à démissionner en attendant que la justice rende ses décisions; 8. Renforcement du contrôle interne et audit interne des entités publiques; 9. Réformes des questions liées aux immunités; 10. Renforcement des structures administratives de contrôle; 11. Renforcement des contrôles préventifs (notamment la patrouille financière); 12. Renforcement et réaffirmation du BTC comme unique entité de contrôle de l’Etat pour les travaux publics ».
Chacun de ces axes vise à renforcer les mécanismes de contrôle et à accroître la responsabilité des gestionnaires publics face aux ressources de l’État.
REFORMER POUR MIEUX TRAQUER LES COUPABLES
En marge de sa leçon magistrale, Jules Alingete a également lancé un appel aux magistrats, aux autorités judiciaires, et aux acteurs de la société civile pour qu’ils soutiennent l’établissement d’une véritable culture de la transparence en RDC. Il a exhorté les participants des États généraux de la Justice à s’engager avec détermination dans ce combat pour que les finances publiques cessent d’être perçues comme une source de profit illicite, mais plutôt comme un bien collectif à gérer dans l’intérêt de tous.
Le discours d’Alingete a suscité de vives réactions et des encouragements, bien que certains experts soulignent les nombreux défis qui se dressent encore pour une véritable réforme. La création d’un Parquet financier nécessitera des réformes institutionnelles profondes, une volonté politique soutenue et, surtout, une réelle indépendance de l’appareil judiciaire.
C’est notamment ces immunités dont se couvre les membres du Gouvernement qui gère, a relevé Jules Alingete, près de «80%» des ressources publiques. Il est donc temps, pense-t-il, de lever les verrous qui les protègent de toute poursuite judiciaire – une façon subtile de faire une pique à l’ancien ministre des Finances, Nicolas Kazadi, lavé de tous soupçons dans les affaires des «Forages et Lampadaires » par le procureur général près la Cour de cassation.
«Nous devenons de plus en plus impuissants face à cela, il faut penser régler ce problème», s’indigne Jules Alingete.
Econews