Paiement des impôts, droits et taxes en franc congolais à dater du 1er avril : un parfum de poisson d’avril

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A partir du 1er avril 2024, les trois régies financières nationales de la République Démocratique du Congo, à savoir la DGI (Direction générale des impôts), la DGDA (Direction générale des douanes et accises) et la DGRAD (Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations), n’accepteront plus de paiement des impôts, droits et taxes à l’Etat en devises étrangères. Seul le franc congolais sera donc admis aux guichets. Ainsi en a décidé le Gouvernement lors de la communication du Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, vendredi dernier, en Conseil des ministres. Pour le Gouvernement, cette mesure rentre dans le cadre de la lutte contre la dollarisation de l’économie congolaise. Ce n’est pas la première tentative dans ce sens. En RDC, la dollarisation de l’économie nationale est comme l’hydre de la mythologie qui se régénère chaque fois qu’on décide de la combattre. Que la mesure entre en vigueur un certain 1er avril, on n’est pas loin d’un poisson d’avril.

A partir du 1er avril 2024, les trois régies financières nationales de la République Démocratique du Congo, à savoir la DGI (Direction générale des impôts), la DGDA (Direction générale des douanes et accises) et la DGRAD (Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations), ne prendront plus en compte les paiements des impôts, droits et taxes à l’État en devises étrangères. Cette décision a été annoncée par le Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, lors du dernier Conseil des ministres.

Réuni vendredi dernier en Conseil des ministres, le Premier ministre a fait part des conclusions de la dernière réunion hebdomadaire du Comité de conjoncture économique qui s’est penché de près sur «l’évolution des principaux agrégats de l’économie nationale afin de maintenir la stabilité du cadre macroéconomique».

Selon le chef du Gouvernement, «la situation sur le marché des changes nécessite, en effet, une politique monétaire restrictive devant contribuer à l’appréciation du franc congolais par rapport au dollar américain. Il s’agit d’appliquer notamment les mesures suivantes : l’obligation de payer les droits, taxes, redevances et factures des entreprises et services publics en franc congolais à partir du 1er avril 2024, y compris l’installation des terminaux dans les supermarchés; la poursuite du processus de dédollarisation de l’économie nationale; la poursuite de la politique de diversification de l’économique nationale et la finalisation des réformes entreprises par la Banque Centrale du Congo en matière de paiement».

«Dans cet élan, pour contenir les pressions macroéconomiques actuelles, la poursuite d’une politique budgétaire prudentielle pour préserver la viabilité budgétaire et la qualité des dépenses publiques s’impose», a rappelé le Premier ministre Sama, soulignant que «le Gouvernement s’emploie à rationaliser ses dépenses en priorisant les dépenses sociales incompressibles afin de préserver le pouvoir d’achat de la population, d’une part, et d’autre part, les dépenses sécuritaires et de souveraineté pour imposer l’autorité de l’Etat dans la partie orientale du pays ».

Pas convaincant, selon les experts

C’est dire que le Gouvernement justifie cette mesure en la plaçant dans le cadre de la lutte contre la dollarisation de l’économie congolaise. Cependant, il est important de noter que ce n’est pas la première fois que de telles actions sont prises pour contrer ce phénomène en RDC. La dollarisation de l’économie congolaise est un défi persistant, comparable à l’hydre de la mythologie qui se régénère chaque fois qu’on tente de l’éliminer.
Un analyste économique redoute la portée de cette mesure, tentée sans succès à une certaine époque.

«La dédollarisation ne se décrète pas. Elle est la résultante des réformes économiques structurelles pro-business interne, en stimulant les rouages de production locaux tout en diminuant l’effet des importations», pense-t-il, estimant que «sans ces mesures prises en amont, la décision ne serait qu’un coup d’épée dans l’eau».

Et de poursuivre : «Souvenez-vous des mesures de dédollarisation en Amérique Latine dans les années 80. Avec de bonnes mesures et des réformes, le Brésil a réussi, mais l’Argentine a échoué lamentablement. Au-jourd’hui, le dollar américain est presque devenu la monnaie nationale de ce pays. Il faudrait également noter qu’en RDC, la plus grosse partie de la masse monétaire est en dollar américain. Cette masse monétaire dont le montant réel est inconnu circule abondamment dans l’économie souterraine. Elle est le fruit des pots-de-vin et de corruption de l’élite au pouvoir. Pour éluder la traçabilité des circuits bancaires, cette masse monétaire en dollar américain est déversée dans le marché de l’immobilier : d’où le boom de ce secteur…».

Autrement dit, l’entrée en vigueur de cette mesure le 1er avril 2024 pourrait sembler ironique, presque comme un poisson d’avril. Cependant, il est clair que le Gouvernement prend cette décision au sérieux dans le but de renforcer l’utilisation du franc congolais dans les transactions financières internes. Cette initiative vise à promouvoir la stabilité économique et à renforcer la souveraineté monétaire du pays.

Vu sous cet angle, cette action marque une étape importante dans les efforts continus de la RDC pour réduire la dépendance aux devises étrangères et promouvoir l’utilisation de sa propre monnaie. Il reste à voir comment cette mesure sera mise en œuvre et quel impact elle aura sur l’économie et les citoyens du pays. Autrement dit, le chemin de la dédollarisation est encore longue et à la fois impénétrable.

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