Les deux chefs d’Etat ont affiché leur soutien à la cause palestinienne. Mais l’implication des deux pays dans le conflit à Gaza diffère grandement.
Après l’avoir repoussée à deux reprises, le président iranien Ebrahim Raïssi a effectué une visite d’Etat ce mercredi à Ankara, où il a rencontré son homologue turc Recep Tayyip Erdogan. Il s’agissait de la première visite d’Etat du président iranien en Turquie depuis son élection en 2021. «Nous avons réitéré notre soutien à la juste cause de la Palestine et renouvelé notre décision de coopérer sur cette question», a affirmé le président Erdogan lors d’une conférence de presse à l’issue de la rencontre.
Mais si Ankara et Téhéran partagent une position pro-Hamas et anti-israélienne depuis le 7 octobre et la riposte de l’Etat hébreu à Gaza , leurs implications respectives dans le conflit diffèrent grandement. L’Iran ne reconnaît pas l’existence d’Israël et fournit un soutien économique et militaire au Hamas, tandis qu’Erdogan a multiplié les diatribes à l’encontre de Benyamin Netanyahou et a qualifié l’organisation palestinienne de «mouvement de libération».
«Hypocrisie»
Reste que la Turquie n’a pas rompu ses relations diplomatiques et économiques avec Tel-Aviv pour autant. Et, contrairement à l’Iran, son soutien à l’égard du Hamas n’a été que politique. Dans la foulée de l’attaque du 7 octobre, elle aurait même demandé à certaines figures de l’organisation de quitter son sol. Ainsi, depuis le début de la guerre à Gaza, les médias pro-gouvernementaux iraniens n’ont cessé de dénoncer «l’hypocrisie » des autorités turques quant à leur refus d’interrompre leurs relations avec Israël.
Au-delà de la question de Gaza, le président Erdogan a évoqué l’objectif d’atteindre un volume de «30 milliards de dollars» d’échanges commerciaux avec l’Iran. Ces dernières années, l’Iran et la Turquie ont entretenu des liens économiques étroits.
Sujets de discorde
Alors que le bloc occidental a tenté d’isoler et d’affaiblir Téhéran par le biais de sanctions économiques, Ankara est devenu l’un de ses principaux partenaires. «Dans le domaine de l’énergie, nous avons décidé de développer nos relations, notamment en ce qui concerne le gaz naturel et le pétrole», a ajouté le président Raïssi.
Bien que l’Iran et la Turquie maintiennent des relations diplomatiques cordiales, les sujets de discorde demeurent. Parmi eux, le rôle de la Turquie dans le Caucase et le projet turco-azerbaïdjanais du corridor de Zanguezour, cette route que les deux pays turciques prévoient de tracer afin d’établir une liaison terrestre directe. Ce corridor, qui traverserait le sud de l’Arménie et l’enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan, suscite l’opposition de Téhéran, qui y voit une menace à son influence dans le Sud Caucase.
Camps adverses en Syrie
En Syrie, Ankara et Téhéran s’opposent par ailleurs depuis plus d’une décennie en soutenant les camps adverses. Tandis que la Turquie a armé et financé les rebelles, l’Iran a appuyé le régime de Bachar Al-Assad, même si, depuis près d’un an, une normalisation des relations progressive s’opère entre les autorités turques et Damas.
«Les organisations terroristes opèrent avec le soutien des pays occidentaux. La stratégie la plus efficace pour contrer le terrorisme est la coopération entre les pays de la région», a plaidé, conciliant, le président iranien.
Avec Les Echos (France)