Une prise de position qui détonne. Invité sur les antennes de BFMTV et de RMC, jeudi 11 janvier, Emmanuel Todd, historien, démographe et anthropologue est longuement revenu sur la guerre en cours en Ukraine, réfutant toute «Poutinophilie ».
Pour l’historien, les États-Unis, qui avaient promis une aide logistique à l’Ukraine, n’ont en réalité pas les moyens de leurs ambitions en raison d’un déclin industriel «qui a démarré vers 1965.»
Selon lui, il convient d’analyser ce conflit non pas seulement les yeux rivés sur le terrain, mais en regardant la dynamique historique générale. De fait, il estime que d’une certaine manière, «les États-Unis sont tombés dans un piège en Ukraine.»
«On a imposé à l’Ukraine des souffrances abominables en entretenant l’illusion que l’Occident avait les moyens industriels de soutenir la guerre », assure-t-il.
«C’est l’Occident qui perd »
Selon Emmanuel Todd, ce piège, «tendu par eux-mêmes et par le nationalisme ukrainien», est la conjugaison de deux facteurs: «l’illusion de disparition de la capacité russe » et «par une inconscience de la destruction de l’appareil industriel occidental et spécifiquement américain.»
«Ce qu’on n’avait pas vu, c’est que l’Amérique est dans un processus de déclin éducatif et industriel qui a démarré vers 1965. […] Il y a eu un phénomène extraordinaire d’une expansion vers l’Est, qui est allé provoquer la Russie dans son espace, d’un monde occidental qui n’allait pas bien lui-même », soutient-il.
L’historien assure qu’il aurait fallu «négocier et intégrer la Russie à l’Occident » et que la guerre va finir « par cesser. » «Ce n’est pas la Russie qui va gagner, c’est l’Occident qui perd », termine-t-il, pointant «un monde de puissances faibles avec des populations déclinantes. »
Une aide occidentale en chute libre
Mercredi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé depuis la Lituanie que les hésitations des Occidentaux sur les livraisons d’aide à Kiev encourageaient Vladimir Poutine, qui veut «occuper» toute l’Ukraine. «Nous devons prêter attention à la rhétorique de Poutine. Il ne va pas s’arrêter. Il veut nous occuper complètement», a-t-il déclaré.
«Nous devons comprendre que la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie et la Moldavie pourraient être les prochaines victimes si nous ne tenons pas », a-t-il averti. Volodymyr Zelensky a par ailleurs souligné que son pays «manquait cruellement» de systèmes occidentaux de défense antiaérienne. «Ces derniers jours, la Russie a frappé l’Ukraine avec un total de 500 engins, nous en avons détruit 70% », a-t-il expliqué.
Ces déclarations interviennent à un moment où un programme d’aide de l’UE d’une valeur de 50 milliards d’euros est toujours bloqué à Bruxelles à la suite du veto de la Hongrie, tandis que le Congrès américain reste divisé sur l’octroi d’une assistance supplémentaire à Kiev.
Selon un rapport du centre de recherche allemand Kiel Institute paru en décembre, l’aide promise à l’Ukraine entre août et octobre 2023 a chuté de près de 90% par rapport à la même période en 2022, atteignant son niveau le plus bas depuis le début de la guerre.
Avec BFMTV