Le Front commun pour le Congo de l’ancien président Joseph Kabila s’est mis en position de boycotter les élections générales de décembre 2023, en flagrante contradiction avec le désintérêt de Kabila. Cette position se ressemble avec celle de l’UDPS en 2006. La consigne d’enrôlement des électeurs n’ayant pas été clairement donnée, les militants sont libres de voter sans suivre le mot d’ordre. Le FCC en contradiction avec la position de son chef conforte la position énigmatique de l’ex-Raïs congolais.
L’ancien président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila, continue de se murer derrière son légendaire silence. Cette fois-ci, la question électorale avec ses inconnues ne l’a pas poussé à sortir de sa réserve pour se prononcer sur toutes les questions brûlantes de l’heure. Bien au contraire, il a décidé de s’introvertir et de ne plus donner ses points de vue. Même sur des questions sécuritaires et diplomatiques, notamment avec le Rwanda, il a gardé le silence.
La publication du calendrier électoral par la Commission électorale nationale indépendante (Céni) n’a pas ému l’ex-président. Même ses lieutenants tâtonnent en parlant de sa candidature à la prochaine présidentielle. La Constitution de la République interdit à tout Congolais qui a déjà occupé les fonctions de chef de l’État pendant deux mandats de cinq ans.
Le PPRD joue sa survie
Fer de lance du FCC, le PPRD, un parti qui perd chaque jour qui passe son âme, s’est imposé un pari dangereux : ne pas s’enrôler aux élections du 20 décembre 2023. L’ancien parti présidentiel, qui a toujours évolué avec Joseph Kabila comme son autorité morale, se bat pour sa survie, ignorant qu’à deux reprises, soit en 2006 et 2011, Kabila s’était présenté en candidat indépendant à la présidentielle. Qu’est-ce que le PPRD attend de Kabila ? Difficile à dire.
Le plus évident est qu’Emmanuel Ramazani Shadary, dauphin de Kabila à la présidentielle de 2018, comme bien d’autres caciques du FCC, pensent que Kabila finira par donner un mot d’ordre pour se positionner par rapport aux élections de décembre 2023. Pour l’instant, le PPRD a levé l’option de boycott – à ses risques et périls.
Cela fait pratiquement deux semaines que la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a lancé l’opération d’identification et d’enrôlement des électeurs dans les provinces de l’ouest de la RDC, mais le PPRD se dit non concerné.
Jeudi 5 janvier, à l’issue d’une réunion du comité exécutif du parti, son secrétaire permanent, Emmanuel Ramazani Shadary, a jeté le pavé dans la mare, estimant que son parti se met à l’écart d’un processus électoral, jugé «non consensuel », se montrant, par ailleurs, envers le pouvoir de Félix Tshisekedi qu’il juge «dictatorial, tribaliste et corrompu».
Le PPRD n’épargne pas non plus la Céni de Denis Kadima qu’il dit être l’émanation d’un processus corrompu depuis son départ.
Pour toutes ces raisons, le PPRD – qui n’a pas obtenu un quelconque point de vue de Kabila retranché dans sa ferme de Kashamata (Lubumbashi) – pense qu’il n’est pas question de participer aux opérations d’identification et d’enrôlement des électeurs dans les conditions actuelles. Bref, le PPRD opte pour le boycott.
Autrement dit, aucun membre de l’ancien parti présidentiel ne devait se faire enrôler. Une situation invraisemblable dans la mesure où la carte d’électeur sert en même temps de carte d’identité provisoire.
Emmanuel Ramazani Shadary a-t-il pris la mesure de ses déclarations ? Qu’en dira Joseph Kabila ? Suspense !
L’un des membres du bureau politique, Patrick Nkanga, qui continue à clamer sa loyauté à Joseph Kabila, minimise l’impact de ce choix politique du PPRD.
«Ce ne serait pas un suicide politique mais une question de cohérence par rapport au diagnostic», a-t-il expliqué au micro de RFI.
Quoi qu’il en soit, dans cette position tranchée du PPRD, Joseph Kabila reste la grande énigme. En brouillant les pistes, Kabila et son camp vont se mettre en position de discréditer les élections de 2023. En exigeant une nouvelle Céni, une recomposition de la Cour constitutionnelle, la préparation de la contestation se met tout autant en place. Le silence de Kabila n’arrangera nullement les affaires du pouvoir en place. Bien au contraire ! Espérons que l’homme au silence légendaire brisera finalement le mythe.
Econews