Des recettes en chute libre : DGRAD, un mauvais élève

Depuis le début de cette année, les recettes publiques sont en chute, alors que les prévisions budgétaires de l’exercice en cours tablent sur un budget, équilibré en recettes et en dépenses, d’environ 16 milliards de dollars américains. Au niveau du Gouvernement, le sujet est pris au sérieux. Ce qui accroit la pression sur le ministre des Finances qui a en charge les trois traditionnelles régies financières de la République Démocratique du Congo, à savoir la DGI (Direction générale des impôts), la DGDA (Direction des douanes et accises) et la DGRAD (Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations). Si la DGI sort du lot en alignant un rythme de mobilisation des recettes qui va, par moment, au-delà, de ses assignations, ce n’est pas le cas pour les deux autres, à savoir la DGDA et la DGRAD. En ce qui concerne la DGRAD, les contre-performances sont telles que cette régie financière passe finalement pour le mauvais élève en termes de mobilisation des recettes. Comment y remédier ? C’est la réflexion qui est en cours au ministère des Finances qui n’exclut plus la possibilité de recourir aux services de l’Inspection générale des finances (IGF) pour encadrer les recettes parafiscales, depuis les services d’assiette jusqu’à leur versement au compte général du Trésor.
Si le Gouvernement s’est félicité d’avoir clôturé l’année 2022 avec des recettes publiques en forte hausse, loin des prévisions fixées dans le budget 2022, l’année 2023 a débuté sur une note largement négative en termes de recettes. Année électorale par excellence, la pression sur le compte général du Trésor est telle que l’inquiétude commence déjà à gagner le Gouvernement au regard du faible niveau de mobilisation des recettes au niveau de trois principales régies financières de la République Démocratique du Congo, à savoir la DGI, la DGDA et la DGRAD.
Dans la rubrique des charges incompressibles de l’Etat telles que la rémunération des agents et fonctionnaires de l’Etat, le Gouvernement manifeste déjà des signes d’essoufflement par l’accumulation des arriérés. Les finances publiques congolaises sont bel et bien dans la tourmente. Dans ces conditions, le Gouvernement saura-t-il atteindre le plafond des prévisions, aussi bien en recettes qu’en dépenses, qu’il s’était fixé dans la loi financière 2023 ? La question vaut bien son pesant d’or, si bien que, dans certains milieux, on exclut plus l’hypothèse d’un collectif budgétaire pour ramener à la baisse les prévisions budgétaires de l’exercice 2023. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement joue encore à l’apaisement, estimant que le sujet n’est pas encore à l’ordre du jour. Des assurances qui ne rassurent pas, dans la mesure où la machine de mobilisation des recettes accumule des contre-performances depuis le début de cette année.

Des recettes qui ne rassurent pas
Réuni le 7 avril 2023 en Conseil des ministres, le Gouvernement s’était penché sur la situation des finances publiques, accordant le temps au ministre des Finances pour faire l’état des lieux des opérations financières de l’Etat.
De l’exposé du ministre des Finances, l’on a essentiellement retenu qu’en termes des recettes, celles mobilisées du 1er au 31 mars 2023 ont été de l’ordre de 1.217,4 milliards CDF sur les prévisions de 1.384,1 milliards CDF, portant ainsi le taux d’exécution à 88%.
La situation cumulée au premier trimestre 2023 présentait un montant total des recettes de 3.340 milliards CDF sur les prévisions cumulées de 3.556 milliards CDF pour un taux de réalisation de 93,9%.
Ce qui donne une moyenne mensuelle d’environ 600 millions de dollars américains.
Comparées aux recettes réalisées au premier trimestre 2022 qui étaient de 3.323 milliards CDF, il s’est donc dégagé une petite augmentation de 16,8 milliards CDF.
En ce qui concerne les dépenses publiques, pour le seul mois de mars 2023, elles se sont chiffrées à 1.381 milliards CDF, dont 46%, soit 631 milliards CDF ont été affectées aux rémunérations.
Selon le ministre des Finances, ceci était dû « au paiement, au cours de ce mois, du solde des rémunérations du mois de février 2023 et une bonne partie du mois de mars. Pour ce dernier, près de 250 milliards CDF des salaires ont été reportés pour être payés en avril 2023 ». Au courant du mois de mars, a-t-il encore indiqué, 30 millions USD ont été mis à la disposition de la Commission électorale nationale indépendante, au titre d’acompte à sa première dotation de l’année 2023, sans compter les dépenses exceptionnelles sécuritaires qui ont représenté, fin mars 2023, un cumul annuel plus de 623 milliards CDF.
Si, au cours de ce Conseil des ministres, le ministre des Finances s’est abstenu à donner un condensé du niveau de mobilisation des recettes au niveau des régies financières, des chiffres parvenus à Econews prouvent qu’au 31 mars 2023, la DGI a mobilisé 560.056.894.952,25 CDF, 382.878.259.293,46 CDF pour la DGDA et 270.167.598.084,09 CDF pour la DGRAD. Ainsi, le total des recettes de trois régies financières, du 1er au 31 mars 2023, donnent, après ajustement 1.414.600.249.890,43 CDF. Rapporté en dollar américain au taux budgétaire, le niveau des recettes de mars 2023 équivaut à environ 650 millions de dollars US, légèrement au-dessous du niveau atteint en janvier et février 2023.
A la lecture de ces niveaux, l’on se rend compte que la DGRAD n’a pas été à la hauteur des attentes. Elle se situe, loin derrière la DGI, talonnée de près par la DGDA, jadis la plus grande pourvoyeuse de recettes courantes, mais qui a finalement perdu ce statut au profit de la DGI.
A la DGRAD, les contre-performances sont devenues pratiquement la règle. Si bien que la situation – du reste malheureuse – observée en mars dernier s’est étendue jusqu’à la moitié du mois d’avril.
Selon des statistiques consultées par Econews, la situation provisoire des recettes, observée du 1er au 17 avril 2023, attribue 336.943.202.418,22 CDF pour la DGI, 189.192.615.006,00 pour la DGDA et 98.758.090.715,79 pour la DGDA. C’est dire que la descente aux enfers se poursuit autant pour la DGDA et la DGRAD. Et si la DGDA tente, tant bien que mal, de se relever, les dégâts sont énormes au niveau de la DGRAD.
La DGRAD dans le viseur
Pour améliorer le niveau des recettes, le ministre des Finances faisait part dernièrement au Conseil des ministres qu’il comptait « sur les conclusions de différents dossiers des contentieux en cours dans les régies financières ainsi que sur les retombées des missions mixtes de contrôle de la Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD) dans les secteurs de mines et de l’environnement ».
Bien plus, à la DGRAD, la situation ne se limite pas aux seuls secteurs des mines et de l’environnement. En réalité, c’est toute la chaîne des recettes parafiscales qu’il faudra auditer, à commencer par les services jusqu’au paiement des taxes et droits dus à l’Etat au niveau de la Banque Centrale du Congo.
Pour donner plus de vigueur à la DGRAD, l’on apprend que le ministre des Finances envisage de recourir aux services de l’Inspection générale des Finances pour accompagner la DGRAD dans son travail de mobilisation des recettes.
A tout prendre, au ministère des Finances, on se déploie pour aérer la machine de mobilisation des recettes en vue de se rapprocher le plus possibles des prévisions de la loi budgétaire 2023.
Avec une moyenne de 600 millions de dollars US des recettes mobilisation des recettes mensuelles, l’on craint que les 16 millions USD inscrits dans le budget 2023 ne soient finalement qu’un leurre.
Il est temps d’inverser la tendance de ces trois premiers mois. Et la DGRAD devait être le point de départ d’un grand travail de redynamisation des régies financières. L’IGF pourrait bien être utile dans ce nouveau challenge.

Econews

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