Elections du 20 décembre : anarchie et improvisation !

On s’y attendait. Depuis plusieurs semaines, voire des mois, les préparatifs des élections générales du 20 décembre 2023 n’inspiraient pas confiance. La catastrophe était prévisible, marquée notamment par un optimisme béat et quelque peu déplacé du président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI)  demeuré sourd aux sollicitations de la classe politique et de la société civile. Son acharnement à organiser coûte que coûte des élections générales dans le délai constitutionnel, malgré une impréparation manifeste a conduit à une catastrophe électorale qui fera date en RDC.  

Au moment où nous mettons sous presse ce jeudi 21 décembre 2023, des sources autorisées à Tshikapa faisaient état de l’arrivée des machines à voter dans la ville principale  de la province du Kasaï, où les scrutins n’avaient pas été organisés la veille. L’enthousiasme a été de courte durée. Et pour cause : les batteries censées alimenter les machines à voter étaient déchargées.

Devant la désapprobation générale des électeurs dont la plupart faisaient le pied de grue depuis 24 heures dans les centres de vote installés pour la plupart dans les cours des écoles , les responsables de la CENI ont sollicité leur patience en attendant de brancher les machines à voter sur des panneaux photovoltaïques qui, eux-mêmes, étaient attendus.

L’exemple de Tshikapa illustre à plus d’un titre le chaos (certains diraient l’anarchie) qui a émaillé les élections générales du 20 décembre pourtant attendues de pied ferme par la majorité du peuple congolais. Il n’est pas non plus un cas isolé. Etant donné que le jour des élections officielles, le 20 décembre, un chaos généralisé a été observé aux quatre coins du pays.

DES DÉROGATIONS HORS-LA-LOI

L’ouverture tardive des centres et par conséquent des bureaux de vote dans la quasi-totalité des provinces (jusqu’à cinq heures de retard dans certain cas); l’absence de bulletins de vote et de formulaires de procès-verbaux, jusqu’au manque d’énergie destinée à alimenter les fameuses machines à voter ont contribué à décrédibiliser un processus électoral déjà miné dès le départ par un bureau de la CENI resté sourd aux sollicitations tant des oppositions que de organisations de la société civile. Les unes et les autres exigeant de longue date une refonte de l’organisation de l’instance dirigeante de la Centrale électorale et d’un audit indépendant du fichier électoral.

Le 20 décembre 2023 qui aurait dû marquer la deuxième phase de  progression démocratique après la passation «pacifique et civilisée du pouvoir» de janvier 2019 aura finalement tourné au cauchemar. A telle enseigne que la CENI s’est résolue à  se passer des prescrits constitutionnels, en autorisant la prolongation des opérations de vote au-delà des 11 heures réglementaires.

Dans son communiqué n°83 du 20 décembre 2023, la CENI informe que «dans les cas exceptionnels où les Bureaux de vote et de dépouillement n’ont pas du tout ouvert, la CENI programme l’ouverture desdits BVD le jeudi 21 décembre  selon les prescrits de la loi et en vertu du principe d’égalité des droits dont tous les citoyens devraient jouir », sans pour autant préciser les tenants légaux desdits prescrits, étant entendu que l’unique dérogation reconnue à la centrale électorale pour un quelconque report se rapporte aux heures d’ouverture et de fermeture des centres de vote.

DENIS KADIMA CLOUE AU PILORI

L’échec du processus électoral, traduit notamment par des votes aléatoires dans la capitale Kinshasa qu’en provinces, est imputé, du point de vue des observateurs au président de la CENI Denis Kadima. Présenté à l’origine comme l’expert parmi les experts dans l’organisation des élections en Afrique, l’homme a affiché un mépris olympien face aux alarmes réitérées venues régulièrement de toutes parts.

Il est néanmoins sorti de son attitude méprisante le 5 décembre (à 15 jours des scrutins) pour enfin réaliser les difficultés logistiques auxquelles la CENI était confrontée. Il demandait alors au chef de l’Etat, lui-même en campagne électorale, une assistance en moyens aériens constitués de 4 avions Antonov et 10 hélicoptères qui lui auraient permis de déployer des centaines de tonnes de matériel électoral.

UN COUP DE MAIN TARDIF 

Ni l’arrivée tardive de deux avions militaires égyptiens à la veille des scrutins, encore moins le déploiement de deux hélicoptères prêtés par le Congo-Brazzaville, ni le coup de pouce de la MONUSCO pourtant sur le départ n’auront suffi à redresser la barre. Dans la confusion, l’Angola a décliné la sollicitation de Kinshasa.

En dépit de l’enthousiasme du gouvernement qui se félicite de l’organisation des élections à la date échue, les observateurs restent unanimes : jamais le pays n’aura connu un processus électoral aussi chaotique.

Hormis les territoires de Masisi et de Rutshuru au Nord-Kivu et de Kwamouth au Mai-Ndombe, la communication officielle passe volontiers sous silence des pans entiers du territoire national dont les citoyens ne sont pas prêts à remplir leur devoir civique. Il s’agit, entre autres, des zones entières de la province de l’Equateur réputées d’accès difficile.

Econews

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