Cri de détresse de Mboso : «Nous sommes sur le point de perdre Kinshasa»

Après plusieurs semaines d’une accalmie relative, les violences intercommunautaires ont repris de plus belle dans les territoires de Kwamouth et de Bagata, dans le Grand Bandundu. Le conflit qui oppose depuis un an les communautés Yaka et Téké a occasionné des déplacements massifs des populations et la destruction de dizaines de villages. Des centaines de familles ont trouvé refuge dans la périphérie de Kinshasa où elles ne bénéficient d’aucune assistance, l’attention des organismes humanitaires et du gouvernement étant plus focalisées sur la situation tout aussi dramatique dans le Nord-Kivu et l’Ituri. C’est le président de l’Assemblée nationale qui vient d’alerter sur une situation en passe d’échapper à tout contrôle.

Prenant la parole lors de la séance plénière de la chambre basse le jeudi 30 mars 2023, Christophe Mboso a attiré l’attention des pouvoirs publics sur la menace qui pèserait, selon lui, sur la capitale. « C’est grave.

Tout près de la ville de Kinshasa, nous n’avons plus le contrôle du fleuve Congo. Des militaires, des marins ont été assassinés sur la rivière Maluku. Nous sommes sur le point de perdre Kinshasa», a-t-il alerté.

Le président de l’Assemblée national n’a certes pas cité les assaillants présumés de ces actes de violence, mais venant de la deuxième personnalité du régime, cette déclaration n’est pas à prendre à la légère. Que de groupes non autrement identifiés s’en prennent aux unités des forces armées en patrouille sur le fleuve Congo ou la rivière Maluku et parviennent à en « assassiner » un nombre important devrait alerter les services de renseignements militaires et civils compte tenu de la tournure que prend le conflit dans le Mai-Ndombe et le Kwango, avec son prolongement dans la commune urbano-rurale de Maluku aux portes de Kinshasa.

Il est utile de rappeler qu’au cours de l’une des séances plénières antérieures, Christophe Mboso avait appelé les députés à « quitter les groupes armés ». Il avait alors été taxé d’alarmiste, d’autres l’accusant d’attiser le feu d’un brasier qu’il aurait été incapable de maîtriser.

Jusqu’à l’éclosion de l’affaire Mwangachuchu, ce député du Nord-Kivu actuellement poursuivi par la justice militaire après la découverte des caches d’armes de guerre dans la concession de son entreprise d’exploitation de coltan à Rubaya (Nord-Kivu) et dans sa résidence de Kinshasa.

Il est à remarquer que dans sa déclaration, Christophe Mboso n’a pas évoqué un quelconque conflit intercommunautaire, laissant entrevoir la possibilité d’une agression étrangère. Probabilité que vient corroborer le degré de sophistication des attaques menées certainement par des moyens militaires élaborés, contrairement aux armes rudimentaires utilisées par les insurgés Yaka ou Tékés.

La crainte exprimée par le président de l’Assemblée nationale sur la perte de contrôle probable de la ville de Kinshasa est aggravée par le fait que les communautés en conflit à Kwamouth et Bagata n’ont jamais fait part d’une quelconque revendication territoriale, la prise de Kinshasa relevant d’une chimère. La pomme de discorde, c’est connu, étant l’occupation des domaines agro-pastoraux et le versement aux chefs traditionnels du tribut prélevé sur les récoltes.

Dès lors, évoquer la perte de contrôle sur le fleuve Congo ou encore, dans le pire des cas, voir la capitale tomber aux mains d’un mystérieux agresseur que Christophe Mboso s’est bien gardé de nommer ne relève pas d’une simple vue de l’esprit. A intervalles plus ou moins réguliers, des médias locaux brandissent la menace que représenteraient les troupes de l’armée rwandaise présentes en Centrafrique, et même des concessions agricoles acquises par des sujets rwandais au Congo-Brazzaville, et qui serviraient en réalité des têtes de pont pour une attaque sur la capitale congolaise.

En attendant que la suite des événements donne raison à Mboso, la vigilance devrait rester de mise. Mais surtout ne pas tomber dans la distraction qui consisterait à porter toute l’attention sur le drame du Nord-Kivu, au détriment de la sécurité dans l’Ouest du pays, et plus particulièrement sur la capitale, Kinshasa.

Econews

Bunagana : le M23 cède le terrain aux troupes ougandaises et interdit toute présence des FARDC

rôle de scenario dans la cité de Bunagana où les « terroristes » du M23 ont finalement cédé le terrain aux troupes ougandaises qui agissent dans le cadre de la Force régionale de l’EAC (Communauté de l’Afrique de l’Est), tout en interdisant formellement toute présence des unités des Forces armées de la République (FARDC).

Autrement dit, Bunagana est donc passé sous administration de la Force régionale de l’EAC, échappant totalement au contrôle de Kinshasa.

Le plus évident est que les troupes de l’armée ougandaise sont entrées vendredi à Bunagana, une cité du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), encore sous contrôle des terroristes du M23, rapporte l’ACP, citant des sources militaires.

«Les premiers éléments sont finalement arrivés sur le sol congolais, et l’heure est à l’identification des sites de cantonnement dans la cité de Bunagana et ses environs», a déclaré le général Jeff Nyagah, commandant de la Force régionale des Etats de l’Afrique de l’Est, au sortir des échanges avec le gouverneur de la province du Nord-Kivu, le lieutenant général Constant Ndima. «(…) Les premiers éléments n’ont pas pu traverser hier suite à la nuit tombée », a rappelé le général Jeff Nyagah.

Cet officier supérieur de l’armée kényane a appelé la population à la patience, ajoutant qu’il s’agit du début d’un processus de déploiement qui doit suivre des étapes.

Ces militaires de l’armée ougandaise sont dans la bourgade de Bunagana dans la perspective de sécuriser cette zone censée être libérée des terroristes du M23, en conformité avec la dernière résolution des Chefs d’Etat de cet ensemble sous-régional.

Pour le commandant de la Force régionale, ce déploiement devra être respectueux des principes militaires tout en tenant compte de la cohabitation pacifique avec les populations locales. Dans un premier temps, ils sont mille militaires UPDF qui sont attendus dans la cité de Bunagana d’où elle est sensée se déployer jusqu’à Mabenga, en passant par Rutshuru-centre, Kiwanja, Rwanguba et Chengerero.

Un autre contingent des troupes de l’armée du Soudan du Sud est également signalé à Goma dans le même cadre opérationnel des troupes de l’EAC. Des unités tanzaniennes devaient aussi agrandir les rangs.

Bien avant le débarquement des troupes ougandaises, une trentaine de militaires burundais sont arrivés, depuis le 5 mars 2023, à Goma, dans le cadre du déploiement d’une Force régionale visant à mettre fin aux violences dans la partie orientale de la RDC.

Les troupes burundaises s’étaient ajouté au contingent de l’armée kényane d’environ un millier d’hommes arrivés, déployé depuis novembre 2022 dans et autour de Goma. Des troupes sud-soudanaises sont encore attendues sur le sol congolais pour compléter le dispositif militaire décidé par l’EAC.

La Force régionale défiée par le Rwanda Malgré l’annonce de l’entrée en vigueur, le 30 mars 2023, d’un nouveau cessez-le-feu dans l’Est de la région, l’armée rwandaise et ses supplétifs du M23 avaient défié la communauté internationale et les organisations sous-régionales africaines, notamment la Force régionale de l’EAC, en attaquant mardi 28 mars la cité de Mweso, dans la province du Nord-Kivu.

Le porte-parole militaire du gouverneur du Nord-Kivu, le lieutenant-colonel Guillaume Ndjike qui avait déploré le fait que ces combats aient provoqué des dégâts collatéraux et le déplacement des populations, avait souligné que « l’attitude de l’armée rwandaise démontre clairement la détermination du pouvoir de Kigali à défier la communauté internationale et à ne pas respecter les recommandations (…) ».

C’est dans ce désordre indescriptible que la Force régionale de l’EAC continue à déployer ses troupes dans la province du Nord-Kivu, tout en privant aux FARDC la capacité de reconquérir les territoires

contrôlés par le M23. Dans l’opinion publique congolaise, on ne comprend plus ce qui se passe réellement dans l’Est de la RDC.

Pour autant que les FARDC n’ont aucun droit d’opérer dans les zones passées sous contrôle de la Force régionale de l’EAC.

On se rappelle que la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), qui est composée de la RDC, de l’Ouganda, du Rwanda, du Soudan du Sud, de la Tanzanie, du Kenya et du Burundi, a mis en place une Force régionale pour intervenir dans l’Est de la RDC en vue d’endiguer l’avancée du terrorisme du M23 et de démettre la centaine de groupes armés.

Si cette Force régionale dit ne pas disposer d’un mandat offensif, à Kinshasa on pense plutôt le contraire. Entre les deux parties, c’est le langage des sourds.

Avec ACP

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